LA NUIT DU COUP D'ÉTAT - LISBONNE AVRIL 74

"L'année dernière à Lisbonne, au cours du tournage de "Republica, journal du peuple", un documentaire sur un épisode de la révolution portugaise, j'ai rencontré et filmé Otelo de Carvalho. Il m'a raconté comment il avait organisé le coup d'état militaire du 25 avril qui a mis fin à quarante-huit ans de fascisme. Ce qui n'aurait pu être qu'un changement de régime politique, le passage d'une dictature civile rigide à un système plus souple posant les bases d'une transition démocratique sans heurts a été le début de la "Révolution des oeillets", le dernier grand mouvement révolutionnaire d'Europe qui a duré près de deux ans. Comment le coup d'état mené à son terme par de jeunes officiers a-t-il pu ouvrir la voie à un mouvement populaire aussi puissant et inattendu? Comment l'intervention populaire a-t-elle modifié le sens du coup d'état du 25 avril? Ces questions sont longtemps restées dans l'ombre et le projet de ce film est de tenter de comprendre ce qui s'est passé ce jour de 1974" (Ginette Lavigne).

Pour ce faire, Ginette Lavigne met en place un dispositif cinématographique aussi original et radical qu'efficace. "Dans un décor épuré comme une scène de théâtre, à l'aide d'un tableau, de cartes, de vieux téléphones et d'une radio, Otelo rejoue devant nous la direction des opérations telle qu'elle était menée heure par heure. Nous entendons les annonces codées qui passèrent à la radio sous forme d'une chanson-signal, le téléphone sonne et les ordres circulent. (...) Au-delà du sobre jeu théâtral et de la reconstitution artificielle, on accède à une vision du réel bien plus prenante que la simple présentation d'archives commentées. Et quand l'image d'archive arrive (les chars, la foule, les oeillets... ) elle nous saisit en pleine émotion là où Ginette Lavigne nous a conduit avec talent : nous revivons au présent l'incroyable mort tranquille et orchestrée d'une dictature" (Mariette Gutherz - www.documentaires.org).

Note : Prix de la sélection française au festival Fictions du réel de Marseille en 2001.