PEOPLE
C’est une voix un peu folle, celle d’un chanteur que l’on
situera vite entre Costello et Rufus Waingright, qui nous balade vers d’étranges
dépouilles sentimentales, les déterrant avec une morgue lunaire.
Un chant qui cherche ses effets dans des décharges kitsch corrosives,
des lignes affectives perdues, épuisées, éculées
et les épouse, en exhibe la chair de poule presque figée, en gelée
(parfois sur le point de dégouliner). Avec tendresse chancelante ou hargne
radieuse. Une sorte de diva transgénique. Dans un répertoire qui
oscille entre glamour feuilletonesque, coupe-gorges hardcores et figures précieuses
de compositeur. La complexité de l’univers sonore surprend : d’abord,
l’attachement à la chanson, la mélodie est affirmée,
comme un oxygène fondamental. Mais ensuite tout le reste est combustion
grandiose, voire grandiloquente. La musique circule agilement dans ces multiples
contrastes et contradictions entre douceurs, mièvreries narcissiques,
rages soniques percutantes, grincements aigres, lyrisme hystérique, humour
noir, vulnérabilité, brutalité, crincrins cosmiques. Mike
Pathos postule que ces contradictions ne sont qu’apparentes, tout se tient,
se soutient. Le chant linéaire, reflet de la narration de séries
télé, est happé dans les limbes électro et devient
une clameur magnétique, paumée, centrifugée, avant de percuter
un numéro époustouflant de folk survolté ou de couper une
ritournelle rêveuse torpillée d’artifices. Le tout s’agrège,
hétéroclite et clinquant, vaisseau spatial bourdonnant, clignotant,
trépidant, crachant le feu, dérivant lentement vers d’autres
dimensions, à rebours. Sarcophage fantastique transportant un grand voyageur
sonique vers l’anéantissement. Flirts avec l’explosion.
(Pierre Hemptinne, Charleroi)